Histoire de Kaliningrad

Kaliningrad, l’ancienne Königsberg, a vu s’affronter au cours des siècles les Allemands et les Russes dans leur lutte pour la domination sur les peuples slaves.

Les chevaliers Teutoniques

The cross of the first missionary Kaliningrad est née de la conquête de la côte de la mer Baltique par les chevaliers Teutoniques au XIIIè. siècle. La Pologne avait fait appel à eux pour réprimer les soulèvements des Bruzi – à l’origine du nom de Prusse – qui peuplaient cette partie du royaume : il s’agissait d‘évangéliser ce peuple païen tout en le soumettant. Le Grand maître de l’ordre, Hermann von Salza, avait obtenu de la Pologne qu’elle s’engage à laisser aux chevaliers la possession des terres conquises.

Les chevaliers Teutoniques sont un ordre religieux de chevalerie fondé en Terre sainte en 1191 comme un hôpital avant d‘être transformé en ordre militaire en 1198. Leur uniforme est un grand manteau blanc avec une croix noire. Il n’est composé que d’Allemands et est dirigé par un grand maître. L’ordre ne s’est véritablement développé qu’avec la conquête des terres slaves situées à l’est de l’Oder. La résidence du grand maître s’est déplacée successivement de Venise à Marbork (aujourd’hui en Pologne) puis à Königsberg (1456) avant d‘être fixée définitivement à Vienne après la réforme. Le grand maître a très vite reçu la dignité de prince du Saint Empire.

La ville de Königsberg a été fondée en 1254. La guerre contre les Bruzi a été particulièrement atroce et la majeure partie de la population indigène a été massacrée. Les chevaliers Teutoniques ont alors fait appel à des colons allemands et polonais pour mettre en valeur les terres nouvellement conquises et peupler les nouvelles villes, organisées en républiques urbaines.

Drang nach Osten

La conquête de ces territoires s’inscrit dans le mouvement plus vaste du Drang nach Osten, cette volonté allemande de s‘étendre toujours plus vers l’est. En avril 1242, ce mouvement a atteint sa limite extrême lors de la bataille du Lac Peïpous, aujourd’hui situé sur la frontière entre l’Estonie et la Russie. Alexandre Nevski, Prince de Novgorod, a alors affronté et remporté la victoire sur les chevaliers Porte-glaive allemands, qui fusionneront plus tard avec les chevaliers Teutoniques.

La bataille n‘était pas gagnée d’avance pour Alexandre Nevski car ses troupes étaient nettement moins bien équipées que celles de ses adversaires. Malgré ce désavantage, le prince russe a engagé la bataille sans attendre et a lancé le combat sur les glaces printanières déjà minces du Lac Peïpous. Les soldats russes, fantassins légèrement armés, se déplaçaient avec aisance sur la glace, alors que les chevaliers allemands, lourdement armés et montés sur leurs chevaux caparaçonnés de fer, n’ont pas tardé à s’enfoncer dans les eaux glacées du lac.

La Ligue hanséatique

Königsberg était membre de la Ligue hanséatique, cette association de villes allemandes qui contrôlait le commerce de la mer Baltique et au-delà. La Ligue hanséatique jouissait de privilèges fiscaux dans les pays étrangers et disposaient de comptoirs importants à Novgorod et à Londres, notamment. Elle faisait le commerce du drap anglais, des fourrures russes, des céréales d’Allemagne du nord, etc. La flotte de la Ligue à compté jusqu‘à 1000 navires de commerce à son apogée, à la fin du XVè. siècle. Elle a commencé à décliner lors de l‘émergence des Etats nations et avec la Réforme, qui amena des dissensions profondes entre ses membres, sans compter la guerre de 30 ans, qui ravagea l’Allemagne, et l’ouverture de nouvelles routes maritimes vers l’Orient.

Le Royaume de Prusse

Kant's tomb Les rapports entre les chevaliers Teutoniques et le royaume de Pologne sont restés harmonieux jusqu’au début du XVe. siècle. Mais le 15 juillet 1410, suite à des dissensions entre les deux parties, la bataille s’engage et les chevaliers se font écraser à la bataille de Tannenberg. Ils doivent céder la Prusse occidentale et accepter la suzeraineté de la Pologne sur le reste de la Prusse.

En 1525, le grand maître de l’ordre se convertit au luthéranisme. Il sécularise le domaine de l’ordre et prend le titre de duc de Prusse, titre héréditaire, toujours sous la suzeraineté de la Pologne. En 1618, le duché de Prusse est rattaché au Brandebourg des Hohenzollern par une union personnelle et en 1660, Frédéric-Guillaume de Prusse obtient de la Pologne qu’elle reconnaisse sa pleine et entière souveraineté sur le duché de Prusse. Enfin, le 18 janvier 1701, Frédéric III de Hohenzollern se fait couronner roi de Prusse sous le nom de Frédéric 1er dans la cathédrale de Königsberg.

A lutherian church in Kaliningrad Königsberg a toujours été une ville importante du royaume de Prusse. Elle en a été la capitale avant de céder la place à Berlin. Son université est fameuse pour avoir abrité l’enseignement du philosophe Kant. Le commerce entre le monde germanique et le monde russe fut à la base de sa prospérité. Son port exportait les céréales (principalement seigle et pomme de terre) ainsi que la production industrielle de toute la région.

L‘époque moderne

The Soviet palast in Kaliningrad Après la défaite allemande de la 1ère guerre mondiale, Königsberg a été séparée du reste de l’Allemagne par le corridor polonais de Dantzig. La reconquête des territoires perdus et le rattachement de la Prusse orientale à l’Allemagne figuraient parmi les revendications invoquées par Hitler pour justifier la guerre. Investie le 27 janvier 1945, la ville ne fut prise par les Soviétiques que le 10 avril suivant, après de très violents combats qui devaient permettre à une partie de l’armée allemande d‘être évacuée par la mer. La Conférence des Alliés, qui s’est tenue à Berlin en 1945, l’attribua à l’URSS.

Les habitants qui avaient survécus à la guerre ont été tués ou déportés en masse par les Soviétiques. Ceux qui ont réchappé des purges ont dû quitter leur maison pour s‘établir en Allemagne de l’Est. Des Russes venus de toute l’ancienne URSS, en particulier de Sibérie, se sont alors installés à Königsberg. La ville a été rebâtie dans un style soviétique inimitable et rebaptisée Kaliningrad, du nom de celui qui occupa le poste exclusivement honorifique de Président du Soviet suprême pendant de nombreuses années. La vieille ville, complètement détruite, a été remplacée par de beaux parcs. Seule la cathédrale a survécu : longtemps restée à l‘état de ruine, elle vient d‘être reconstruite grâce aux dons de mécènes allemands.

Russia's Baltic Fleet Pendant l‘époque soviétique, le territoire de Kaliningrad était une zone stratégique fortement militarisée. D’immenses zones étaient interdites mêmes aux habitants de la région. Aujourd’hui, de nombreux soldats ont été démobilisés mais le port de Baltisk, à 30 kilomètres à l’ouest de la ville de Kaliningrad, abrite toujours la flotte russe de la mer Baltique.

Depuis quelques années, le port de Kaliningrad a retrouvé une activité importante. La région a reçu un statut de zone économique spécial et tente d’attirer les investisseurs étrangers. Très attachés à Moscou, les habitants n’ont pas l’intention de se séparer de la Russie, même si la situation géographique de l’enclave leur apporte des désavantages : avec l’adhésion en 2004 de leurs voisins, Pologne et Lituanie, à l’Union européenne, le régime des visas de transit s’est considérablement durci, ce qui rend difficile les liaisons par la route et le rail avec la mère patrie. Gageons que Kaliningrad, point chaud géopolitique et îlot russe en Europe centrale, restera encore pendant plusieurs années une pomme de discorde entre la Russie et l’Europe.

Ambre

Amber collected on the beach La région de Kaliningrad abrite la plus grande mine d’ambre du monde, dans le village de Yantarni. L’ambre est une résine fossile que l’on trouve principalement dans les sédiments des bords de la mer Baltique. Il a été étudié très tôt par les savants – Aristote l’a décrit dans ses ouvrages – mais son étude systématique n’a commencé qu’au XVIIIè. siècle. Le savant russe Lomonossov a été le premier à défendre l’idée qu’il s’agissait d’une résine provenant d’un arbre. Aujourd’hui, on sait que l’ambre est un témoignage des grandes forêts de conifères qui s‘étendaient il y a fort longtemps sur l’Europe du Nord.

Amber mine Utilisé depuis le IIIe. millénaire dans un but à la fois décoratif et curatif, l’ambre jaune a été l’objet d’un commerce important dans l’Antiquité. Pierre née de l’eau, pierre qui emprisonne la vie, avec ses inclusions d’insectes ou de débris végétaux, pierre qui brûle, pierre qui attire après frottement les corps légers, l’ambre est une matière ambiguë qui a inspiré diverses légendes.

Les anciens expliquaient la naissance de l’ambre par l’histoire de Phaéton, le fils d’Hélios. Phaéton obtint un jour la permission de conduire le char du Soleil, mais, dans sa maladresse, il mena son équipage trop près de la Terre, qu’il condamnait ainsi à une terrible sécheresse. Pour arrêter ces désordres, Zeus lança sa foudre sur le char et Phaéton tomba dans un fleuve où il trouva la mort. Les dieux eurent pitié du chagrin inconsolable de ses sœurs et les changèrent en arbre. Les larmes des jeunes filles furent autant de gouttes de résine qui devinrent de l’ambre.

Amber digger Cette légende, et bien d’autres croyances qui attribuaient à l’ambre des pouvoirs magiques et curatifs, développèrent un artisanat actif, encore vivace aujourd’hui dans la bijouterie